Quand les banques suivent de près l’évolution des droits des femmes
Pour les banques comme pour les femmes, la loi du 13 juillet 1965 est déterminante. Un nouvel enjeu en pleine période de bancarisation et d’évolutions sociétales se dessine explicitement. Les femmes deviennent une clientèle à part entière. Dans ce contexte, les banques lancent des campagnes inédites partout en France en s’adressant directement à la « femme moderne ».
Loi, banques et femmes : quand ouvrir un compte est possible pour toutes
« La femme avisée, pour simplifier sa vie, se fait ouvrir un compte en banque : cette brochure, publiée à votre intention, Madame, vous donnera tous les renseignements utiles pour l’ouverture d’un compte et son utilisation. »
Au début des années 1960, la Banque nationale pour le commerce et l’industrie (BNCI) interpelle directement la clientèle féminine. La femme mariée en fait partie, le statut de cette dernière évolue enfin. À partir de 1965, une épouse peut devenir une cliente comme les autres à la banque. Au même titre qu’une célibataire ou une veuve.
L’article 221 de la loi du 13 juillet 1965 indique que « Chacun des époux peut se faire ouvrir, sans le consentement de l’autre, tout compte de dépôt et tout compte de titres en son nom personnel. » Ouvrir un compte en banque pour une femme mariée n’était donc pas une évidence avant les années 1960.
Lorsque les banques sont attentives aux évolutions sociétales
Les banques épousent donc les évolutions sociétales de l’après-guerre. On s’adresse aussi bien à Monsieur qu’à Madame. Un réel effort de communication se traduit par une vaste campagne de publicité éducative. Il faut faire savoir à la « femme moderne » que la banque l’accompagne dans ses démarches financières et bancaires. Lui faciliter la gestion du budget familial est à présent une priorité.
Il est temps en cette fin des années 1960 et ce pour deux raisons : l’arrivée sur le marché du travail des nouvelles générations de jeunes femmes nées entre 1942 et 1955 ainsi que la bancarisation de la société.
Si les Français sont faiblement bancarisés en 1967 – 15 à 18% seulement des ménages détiennent un compte en banque – on voit émerger avec la montée du salariat la bancarisation de la société, c’est-à -dire l’équipement des ménages en services financiers et produits tel l’emploi du compte chèques. À la fin des années 1980, on dépasse les 90% des comptes en banque.
Quand les femmes représentent un marché prometteur pour les banques
Les banques l’ont bien compris, les femmes prennent de plus en plus d’initiatives et de décisions en matière de dépenses.
Dès lors, la clientèle féminine devient une véritable cible pour les établissements bancaires. La BNP, la Société Générale ou le Crédit Lyonnais déploient alors leurs services auprès de cette nouvelle clientèle.
À l’échelle de l’Europe et sur une temporalité différente – dès le début des années 1960 pour les Suédoises jusqu’au milieu des années 1970 pour les Italiennes – les femmes représentent un marché extrêmement prometteur pour les banques. Les femmes comptent.
Née en 1966, la BNP ne rate pas cette actualité et en fait un objectif principal. Bien connaître la clientèle féminine pour répondre ou devancer ses attentes.
Une nouvelle communication voit le jour
La BNP multiplie les initiatives : insertion de questions financières spécifiques dans la presse magazine féminine, enquête sur la gestion du budget familial, publication d’une brochure intitulée « je fais mes comptes en 3 minutes par jour », etc. jusqu’à l’organisation de tables rondes avec des femmes sélectionnées par les agences pour entendre ce qu’elles en pensent et adapter au mieux les services proposés. Dès 1973, la banque investit même la presse spécialisée des jeunes filles.
En fin de compte, la BNP, à travers ses différentes campagnes de publicité au fil des décennies, met l’accent sur l’image d’une banque qui se veut proche des gens, surtout des femmes.
La BNP est là pour faciliter la vie de celles qui tiennent la maisonnée budgétairement : « C’est ma BNP qui s’occupe de mes factures de gaz et d’électricité » ou bien « Occupez-vous du déménagement, nous nous occuperons des paperasses », lit-on sur les affiches de rue en 1981. Une nouvelle communication apparaîtra à partir des années 1990 lorsque les femmes deviendront de plus en plus diplômées, cheffes de services voire d’entreprise. Les banques s’interrogeront sur les attentes financières bancaires des femmes… mais ceci est une autre histoire.
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