Alphonse Pinard, banquier républicain
Alphonse Pinard (1815-1871) est une figure importante de l’histoire bancaire en France. Il participe à la création du Comptoir national d’escompte de Paris (CNEP) dont il prend la direction, avant d’accompagner la formation de la Banque de dépôt et de crédit des Pays-Bas puis celle de la Société générale. Retour sur le parcours d’un banquier républicain méconnu.
Les années d’apprentissage
Né à Sens le 18 janvier 1815, Alphonse Pinard n’est pas prédestiné à une carrière dans la finance. Dans sa famille de la petite bourgeoisie catholique, le père est professeur de collège. Son premier frère est colonel d’infanterie et le second, curé de Notre-Dame de Versailles. A vingt-cinq ans, Alphonse Pinard est commissaire-banquier. Avec un associé, il ouvre le 30 septembre 1840 une maison de « commission de banque et de recouvrement » à Paris. Son mariage avec Adèle Emelie Robert, la fille d’un négociant de Saint-Quentin, conforte sa position dans les milieux d’affaires et lui apporte un capital de 120 000 francs.
L’homme de la situation
En 1846, la France connaît une grave crise du crédit. La mauvaise récolte de blé nécessite des importations depuis la Russie qui pèsent sur les réserves de la Banque de France. Puis la révolution de 1848 déclenche une crise de confiance et un blocage de l’encaissement des effets de commerce. La création de comptoirs d’escompte, destinés à faciliter l’escompte de ces effets, constitue l’un des premiers chantiers de Louis Garnier-Pagès, dès sa nomination au ministère des Finances. Le banquier Pinard, délégué d’une réunion de négociants en tissus, vient alors réclamer la fondation d’une organisation de ce type à Paris. Garnier-Pagès l’adjoint à la commission consultative où siègent notamment l’éditeur Louis Hachette et l’industriel Emile Pereire. Le 8 mars 1948, le Comptoir national d’escompte de Paris (CNEP) est créé. Pinard, le professionnel, est nommé sous-directeur aux côtés du libraire Laurent-Antoine Pagnerre, le politique. En octobre 1854, il est conforté à son poste de direction à l’unanimité, avec Hippolyte Biesta. Le CNEP bénéficie alors de nouveaux statuts lui garantissant une plus grande autonomie par rapport au pouvoir.
La grande aventure bancaire
L’année 1860 marque un tournant pour le Comptoir d’escompte. Dans la foulée de l’accord de libre-échange entre la France et l’Angleterre, un décret du 25 mai autorise l’établissement bancaire à ouvrir des agences dans la France entière, mais aussi dans les colonies et à l’étranger. Pinard, membre du Conseil supérieur de l’Algérie et des Colonies depuis 1858, s’impose une fois encore comme un homme clé. Il devient la cheville ouvrière du CNEP et du volontarisme financier français.
Au début des années 1860, le Comptoir d’escompte ouvre des agences à Shanghai, Calcutta, Saigon, bientôt Yokohama. À la même période, en 1863, Pinard crée la Banque de dépôt et de crédit des Pays-Bas (ancêtre de Paribas) avec ses associés, Louis-Raphaël Bischoffsheim et Edouard Hentsch. Incontournable dans le milieu de la banque française, Alphonse Pinard participe aussi à la création de la Société générale en 1864 et dirige l’établissement pendant un an, aux côtés d’Edouard Hentsch et Paulin Talabot. Ses réalisations dans un moment de transformation de l’industrie bancaire n’ont pas suffi à maintenir vivace le nom d’Alphonse Pinard. Sa mort précoce à 56 ans, les bouleversements subis ensuite par le Comptoir d’escompte en sont peut-être la cause.
En savoir plus : avec l’article de Nicolas Stoskopf sur Alphonse Pinard
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