Les femmes et la Banque

Que ce soit pour travailler ou ouvrir un compte, épargner ou dépenser leur argent en toute liberté, les femmes sont parvenues à faire évoluer leurs droits au cours de ces 150 dernières années afin de conquérir leur indépendance financière.

Une émancipation au long court depuis l’adoption du code Napoléon, qui les assimilaient aux enfants mineurs, jalonnée de grandes étapes.

En quelques dates

La marche des Françaises vers l’autonomie financière

L’émancipation financière des femmes en France débute en 1881. Cette année-là, une loi autorise les femmes à ouvrir un livret d’épargne en toute autonomie. La loi de 1895 vient renforcer cette mesure, leur permettant d’y effectuer des versements et retraits sans l’aval de leur mari.

Jusque-là consacrées « incapables majeures » par le code napoléonien de 1804, les femmes ne pouvaient pas gérer seules leur épargne. Les lois de 1881 et 1895 abandonnent cette notion au profit d’une autre : celle de femme « non assistée de son mari ». Une mention apposée sur les livrets de caisse d’épargne ouverts par les femmes mariées. Puis en 1907, une autre révolution se produit : les femmes obtiennent le droit de disposer de leur salaire comme elles l’entendent.  

On observe à partir des années 1880 également la création de nouveaux services administratifs. C’est le début des premières embauches des femmes dans les grands établissements financiers, ouverture qui s’inscrit dans un mouvement plus général de féminisation des emplois de bureau.

Les femmes semblent parfaitement convenir à ces nouveaux emplois. On les trouve dans les bureaux des recouvrements, aux services comptables et surtout dans les bureaux des titres et des coupons.

Au bureau des titres, les femmes effectuent l’émargement des obligations.

Une fois les coupons payés, les femmes les découpent et les collent sur les feuilles des gros volumes de la banque, en indiquant la date et le nom du bénéficiaire.

Les femmes travaillent sous l’œil d’un cadre lui-même forcément féminin, car les femmes n’ont aucun contact ni avec les clients, ni avec leurs collègues masculins.

Dans certaines banques, elles entrent par un escalier spécial, et partout, elles travaillent et mangent dans des salles séparées.

De plus en plus nombreuses à travailler

En 1909, les femmes, souvent des jeunes filles instruites de classes moyennes qui se trouvent dans la nécessité de travailler, représentent un dixième du personnel central du Crédit foncier. En 1914, elles comptent pour environ 25 % du total de l’effectif parisien du Comptoir national d’escompte de Paris (CNEP), soit près de 700 sur 3000.

Mais ces chiffres cachent une disparité de statuts : les femmes ont un salaire inférieur à celui de leurs collègues masculins. Leurs conditions de travail sont également très précaires. Au service des coupons par exemple, parfois engagées la veille des jours des grands paiements, elles sont congédiées aussitôt après. Et dans les services moins saisonniers, elles n’ont souvent qu’un statut d’auxiliaire et mettent beaucoup plus de temps que les hommes à obtenir celui de titulaire. C’est pour lutter contre ce statut précaire que les femmes employées à la journée au CNEP créent, dès 1902, une société libre. Cette société libre finance les indemnités en cas d’absence liée à une maladie.

Quand la guerre fait évoluer les mentalités

Les conflits majeurs du XXe siècle accélèrent le mouvement d’émancipation financière et professionnelle des femmes en France.

La Première guerre mondiale conduit les femmes à entrer massivement sur le marché du travail et à gérer le quotidien sans les hommes, partis au front. 

L’enjeu est avant tout économique : en ces temps difficiles, il fallait trouver le moyen de soutenir le développement commercial et industriel de la France.

Appelées en renfort dans les bureaux comme sur les lignes de production, les femmes mariées bénéficient également, pendant cette période, de procurations qui les autorisent à gérer l’argent du compte de leur mari.

Durant la Seconde guerre mondiale, les femmes obtiennent le droit de vote (ordonnance du 21 avril 1944 signée par le Général de Gaulle).

Les femmes actrices de la révolution mécanographique

Pour contenir les coûts de traitement qui grimpent en flèche et gérer la quantité croissante de comptes, d’écritures et de pièces comptables, les banques adoptent les nouvelles méthodes d’organisation du secteur industriel. C’est d’abord la mécanisation de la manipulation du document papier, puis son traitement à l’aide de machines comptables de bureau.
Les femmes sont partie prenante de la transformation des méthodes de travail qui s’opère au sein des banques, et qui fait d’elles des icônes de la révolution bancaire mécanique et du traitement de l’information de masse.

13 juillet 1965 : la loi qui a changé la vie des Françaises

Pour les banques comme pour les femmes, la loi du 13 juillet 1965 est déterminante. Elle autorise la femme mariée à devenir, au même titre qu’une célibataire ou une veuve, une cliente comme les autres.

Désormais, les femmes mariées peuvent ouvrir un compte bancaire en leur nom et travailler sans le consentement de leur mari. Elle deviennent alors une clientèle à part entière.