Accueil / Articles / BNP Paribas au coeur de la seconde guerre mondiale BNP Paribas au coeur de la seconde guerre mondiale Temps de lecture : 25min Nombre de likes : 23 likes Mise à jour le : 23 Sep 2024 Tags :Banques ancêtres . BNCI . CNEP . crises . Histoire . International . Paribas . Seconde guerre mondiale L’année 2024 marque le 80e anniversaire des débarquements et de la Libération de la France. En 2025, nous fêterons les 80 ans de la Victoire de la Seconde guerre mondiale. C’est l’occasion pour Archives & Histoire de faire (re)découvrir l’histoire des banques ancêtres aux prises avec une période trouble et mouvementée, et de proposer au cours de l’année à venir une série de publications inédites qui s’appuieront sur des documents issus des fonds historiques du Groupe. Pour lancer cette séquence, revenons sur les dates clefs de la décennie 1938-1947, qui a complétement refaçonné un pays, un continent, et le monde. 1938-1939 : Les préparatifs et le début de la guerre En 1938, l’Allemagne annexe l’Autriche et menace la Tchécoslovaquie, pays que la France promet de défendre en cas d’agression. Mais celle-ci ne veut agir seule et les Britanniques refusent de se battre pour Prague. En signant les accords de Munich, Neville Chamberlain, Premier ministre britannique et Edouard Daladier, Président du Conseil, accèdent aux revendications de Hitler pour la région des Sudètes, abandonnant l’allié tchécoslovaque, pensant avoir « sauvé la paix ». Dans ce contexte international tendu, le Conseil supérieur de la Défense nationale prescrit aux banques de transporter leurs services de conservation de titres qui se trouvent dans des villes proches des frontières allemande et belge vers des régions moins exposées en cas de guerre. Emprunt de la Défense Nationale 5% émis par la Banque Régionale du Centre en 1938, Archives historiques BNP Paribas, 4AF688 La Banque nationale pour le commerce et l’industrie (BNCI) entreprend de regrouper toutes ses activités de conservation des titres en Bretagne, où elle a acquis en décembre 1938 le domaine du château de La Conninais, à deux kilomètres de la ville de Dinan. Y sont entreposés les titres du nord et de l’est de la France. Domaine de la Conninais, 1948, Archives historiques BNP Paribas, 6Fi248 En 1939, et au mépris des accords de Munich, les troupes allemandes envahissent la Tchécoslovaquie. A son tour menacée, la France et le Royaume-Uni promettent de défendre la Pologne. Mais, à la stupeur générale, le pacte germano-soviétique est signé à Moscou. Hitler est ainsi libre d’attaquer la Pologne, dont le territoire doit être partagé avec l’URSS. Le Royaume-Uni et la France déclarent la guerre à l’Allemagne le 3 septembre. La mobilisation générale est décrétée. Très réactive, la BNCI prend des dispositions pour réorganiser les activités de la banque, en tenant compte des nécessités militaires. Découvrez le Conseil d’administration du 19 septembre 1939 qui revient sur les impératifs financiers, les questions relatives au personnel et les contraints d’évacuation auxquelles est confrontée l’institution bancaire. 1940-1943 : Tenter de sauver ce qui peut l’être Dès 1940, la BNCI évacue et réoriente ses activités Après la signature de l’armistice à Rethondes le 22 juin 1940, le territoire français est morcelé et partiellement occupé par les armées allemande et italienne dans une petite zone au sud-est, avant de l’être entièrement à partir du 8 novembre 1942. En 1940, avec l’envahissement de la France puis l’Occupation, la BNCI doit évacuer les titres conservés à Dinan vers la zone libre à Pau. Ce sera chose faite le 20 juin, après une évacuation qui aura donné des sueurs froides et duré 5 jours. Employés traitant des fichiers clients, site de conservation des titres de Dinan, 1939, Archives historiques BNP Paribas, 11Fi690-2 Agence de Pau de la BNCI, 1957, Archives historiques BNP Paribas, 11Fi543 Découvrez cet épisode rocambolesque dans une vidéo inédite En ce qui concerne son activité, la BNCI va se « délocaliser » hors de France et préparer l’après-guerre. Elle installe une filiale en 1938 dans la capitale britannique. En 1947, elle deviendra la British & French Bank, filiale de la banque de droit anglais à capitaux français, afin de lui permettre de développer son activité à Londres au sortir de la Seconde guerre mondiale. British & French Bank, 1947, Londres, Archives historiques BNP Paribas, 12Fi40 Dans le même temps, alors que la France est occupée, coupée en deux zones et que son économie est atone, la BNCI va se développer outre-mer, n’ayant plus la possibilité de se déployer sur le sol français, ni accompagner les clients qui ont investi dans le commerce international. Les contraintes imposées par la guerre vont inciter la banque à s’internationaliser. Alger en sera le point de départ. Dès juillet, la BNCI prend le contrôle de la Banque de l’union nord-africaine, qui devient la BNCI Afrique (BNCIA). L’objectif est de donner une nouvelle dimension à ce petit établissement d’Alger, avant de créer d’autres sièges dans le pays. Dans le même temps, une agence est fondée à Casablanca au Maroc, une autre à Saint-Louis du Sénégal. La BNCI se forge une place croissante en Afrique avec des sièges ouverts en 1941 en Tunisie et en Guinée. La même année, la BNCI rachète le Crédit Foncier de Madagascar. Le développement de la BNCIA se poursuit avec l’ouverture d’une trentaine de sièges en Syrie et au Liban, qui étaient alors sous mandat français. Plaquette de la BNCI avec le détail des implantation à l’étranger – Afrique occidentale et équatoriale, Maroc, Algérie et Tunisie, 1953, Archives historiques BNP Paribas, 1Fi262-2-5 1940 : les relations internationales de Paribas mises au service de l’effort de guerre Au plus fort du conflit, quand l’Allemagne et ses alliés avaient un indéniable ascendant, le gouvernement français et ses alliés ont pu s’appuyer sur certaines figures de Paribas. Jacques Allier en est l’une des plus marquantes. Il a été un maillon essentiel dans ce que l’on a appelé la bataille de l’eau lourde, indispensable aux recherches menées par Frédéric Joliot-Curie sur l’atome et la fission de l’uranium. L’eau lourde est un enjeu national et international. C’est la Société norvégienne de l’azote et de forces hydroélectriques ou Norsk Hydro, basée en Norvège, qui est le seul producteur européen et qui en possède une quantité suffisante pour poursuivre les recherches en cours. Jacques Allier, sous-directeur chez Paribas et réserviste au Service des poudres, est mobilisé en 1939 au cabinet technique de Raoul Dautry, alors ministre de l’Armement. Il est chargé en 1940 d’obtenir de l’usine norvégienne qu’elle vende son stock d’eau lourde à la France. Fondé de pouvoir à Paribas et chargé des relations internationales, Allier connaissait bien la Norvège et le directeur de Norsk Hydro, Axel Aubert. Dautry compte sur ces liens commerciaux et amicaux historiques pour faciliter la transaction. La mission confiée à Allier sera couronnée de succès, puisque ce stock d’eau lourde échappe aux Allemands et fut expédié en France en mars 1940 avant de regagner l’Angleterre en juin 1940. Ecoutez le récit de cette mission digne d’une passionnante aventure d’espionnage La banque joue également un rôle dans le blocus de l’Allemagne en visant à empêcher l’approvisionnement allemand en pétrole. La compagnie pétrolière roumaine, Steaue Romana, une filiale de la banque, réserve toute sa production aux Alliés. C’est par l’entremise de Charles Rist, administrateur de la banque depuis 1933, qui présidait le comité consultatif institué auprès du ministre du Blocus, qu’il fut possible de priver ainsi l’Allemagne de produits essentiels à son effort de guerre. Au printemps 1940, par l’intermédiaire de sa succursale de Bruxelles, Paribas contribue aussi à constituer une société commerciale belge qui devait permettre au ministère de l’Armement de passer des commandes à des fournisseurs des pays neutres, en particulier espagnols et portugais. Mais en 1940, Hitler lance une gigantesque offensive à l’Ouest de l’Europe. Surprises par la « guerre éclaire », les armées alliées sont dépassées. Les Britanniques quittent le continent et la France – bientôt en partie occupée – signe l’armistice avec l’Allemagne nazie en juin. Les événements de mai 1940 interrompent toute action. Les titres de Paribas avaient déjà été transférés à Genève et quand les combats débutèrent en Belgique, la succursale de Bruxelles évacua ses titres et ceux de ses clients à Paris. Fin mai, tout le personnel de la banque fut dispersé. Emile Moreau, président de la banque depuis 1931, est démis et remplacé par Laurent-Atthalin en janvier 1941. CNEP, 2 place de l’Opéra pendant l’Occupation, coupure d’un journal allemand de l’époque, 1942, Archives historiques BNP Paribas, 10Fi341 Dans un rapport de force défavorable à la France et à ses Alliés en ces premières années de guerre, les banques tentent de préserver leurs activités et positions, tout en mettant leurs atouts au profit d’un Etat combatif, jusqu’à la signature de l’armistice de juin 1940 tout le moins. En 1941, la Grèce et la Yougoslavie sont envahies par l’Allemagne nazie et ses alliés. En France, le régime de Vichy s’enfonce dans la collaboration, menant aux premières rafles de Juifs et à la spoliation de leurs biens. A Pearl Harbor, dans le Pacifique, les Américains sont attaqués par surprise et sans déclaration de guerre par le Japon, faisant alors entrer les Etats-Unis dans cette guerre qui devient réellement mondiale. Au tout début de l’année 1942, les nazis mettent au point la « Solution finale », dont l’objectif est l’extermination des Juifs d’Europe. En 1943, les Allemands capitulent à Stalingrad, après une contre-offensive soviétique. A Tunis, les dernières forces de l’Axe présentes en Afrique du Nord déposent elles aussi les armes, avant que les Alliés ne débarquent pour la première fois en Europe, en Sicile. En France, la Résistance monte en puissance. Affiche Salut à la Résistance et en avant !, 1945, Archives historiques BNP Paribas, 3Fi212 1944-1949 : un pays et un monde à reconstruire 1944 : le tournant Année décisive, 1944 voit les puissances de l’Axe reculer sur tous les fronts. En ce qui concerne la France, le début d’une renaissance de la vie politique et sociale accompagne la libération militaire du territoire. CNEP, 2 place de l’Opéra, à la libération de Paris, 1944, Archives historiques BNP Paribas, 4Fi50 Dès le matin du 6 juin, s’engage « la bataille de la France » comme l’annonce le général De Gaulle au micro de la BBC. Le débarquement allié sur les côtes normandes est suivi le 15 août du débarquement en Provence, auquel participent massivement des troupes françaises. L’action conjointe des troupes alliées et de la Résistance permet la libération progressive de l’Hexagone. Le point culminant est la libération de Paris le 25 août et la reprise de Strasbourg. Notons le rôle de Jacques de Fouchier, alors jeune inspecteur des Finances, un temps directeur de cabinet du ministre des Finances de Laval en avril 1942, qui a démissionné après le discours de Laval sur la victoire de l’Allemagne et l’occupation de la zone libre, et a rejoint lui aussi l’armée française en Algérie puis en Italie. Il jouera un rôle majeur dans les destinées de la banque au sortir de la guerre et la reconstruction du pays, en créant ce qui deviendra la Compagnie bancaire. 1944-1945 : le rôle de la Résistance Au début de l’année 1944, la Résistance est bien mieux organisée et ses effectifs sont bien plus nombreux qu’à ses débuts. Les réseaux pratiquent le renseignement, montent des filières d’évasion et assurent des actions de sabotage, jouant un rôle clé dans la libération du territoire. Des actes de Résistance dans le milieu de la banque, il y en a eu, avec une minorité qui s’est engagée aux côtés de la France libre ou des Alliés. Chez Paribas, un dirigeant de haut rang, André Debray, « se mit au service de la Résistance, organisant clandestinement son financement dans les locaux de Paribas et participant aux combats de Paris en août 1944 ». Il sera directeur de la banque entre 1944 et 1954. Des actes de bravoure, il y en a eu aussi à la Banque Belge pour l’Étranger (banque ancêtre de BNP Paribas Fortis), installée à Londres. La « Victoria Cross », une des plus hautes distinctions décernées par l’Empire britannique, récompense des actes de bravoure exceptionnels (« conspicuous bravery ») : en 150 ans d’existence, elle a été accordée à moins de 1400 reprises. Parmi les héros qu’elle honore, un employé de banque – le seul peut-être : George-Albert Cairns. Banque belge pour l’Etranger, Londres, Bishopsgate 4, ca 1945, Archives historiques BNP Paribas Fortis Si la célébration de la victoire sur l’Allemagne nazie le 8 mai 1945 met fin aux combats, des centaines de milliers de Français restent sans nouvelles de leurs proches, ignorant s’ils sont morts ou vivants, internés ou déportés en Allemagne, disparus lors des combats de la Libération. Au printemps 1945, plus d’un million et demi de personnes (prisonniers de guerre et civils) doivent rentrer en France. Beaucoup de villes sont détruites. 1944-1946 : La restauration de l’ordre républicain et la reconstruction du pays Au fur et à mesure que le territoire retrouve sa liberté, les Français réinventent les institutions politiques et veulent réformer les structures juridiques et économiques du pays. Sous la double impulsion du Gouvernement provisoire de la République française (GPRF) présidé par le général De Gaulle, et des Comités de libération mis en place localement par la Résistance, l’administration provisoire, qui avait été mise en place en 1944, prend les rênes du pays. Les compétences de l’État sont élargies aux domaines économique et social. La restauration économique Sur le plan économique, afin d’accélérer la reconstruction et le retour à la normale, de grands groupes nationaux sont créés dans des secteurs stratégiques comme celui des transports ou de l’énergie. Le secteur bancaire doit lui aussi suivre le mouvement, s’inscrivant dans un large programme de réorganisation de l’ensemble de l’activité bancaire, qui donne à l’État le contrôle du crédit. L’État devient ainsi actionnaire principal de la Banque de France en janvier 1946. Les banques ancêtres, elles, connaissent des destins variés. La BNCI et le CNEP sont nationalisées, comme toutes les grandes banques de dépôts françaises. En optant pour le statut d’une banque d’affaires, Paribas échappe quant à elle à la nationalisation prévue par la loi du 2 décembre 1945. La restauration sociale Sur le plan social, le GPRF et la IVe République, proclamée le 27 octobre 1946, mettent en place les points les plus importants du programme du Conseil national de la Résistance : apporter une certaine protection et une redistribution des fruits de la prospérité à toute la population – c’est la naissance de la Sécurité sociale le 22 mai 1946, créant un système de solidarité qui vise à améliorer la santé des Français. Un renforcement des pouvoirs est aussi donné aux comités d’entreprise. Durant les années de guerre, la BNCI s’est beaucoup engagée dans le soutien de ses employés : cela concerne les familles des hommes envoyés dans les camps de travail en Allemagne, la mise en place à partir de la libération d’un éventail d’aides pour les sinistrés de guerre, les allocations familiales, des prêts et primes pour les familles décimées par la guerre, la prise en charge des enfants, etc. Les épurations Afin d’éviter les règlements de compte entre résistants et collaborateurs, le GPRF décide de mener une épuration administrative, économique ou médiatique. Des blessures ouvertes pendant la guerre sont ravivées lors des grands procès de l’épuration, qui prennent la suite de l’épuration extra-judiciaire de l’automne 1944. Les banques ne sont pas épargnées. Laurent-Atthalin, président de Paribas depuis janvier 1941, démissionna sur injonction du gouvernement provisoire et fut remplacé par L. Wibratte en novembre 1944. La reconstruction du pays Au lendemain de la guerre, la France est un pays détruit et désorganisé économiquement, l’industrie et le parc immobilier français sont sinistrés. L’État doit relancer l’appareil productif d’un pays qui fonctionne au ralenti et reconstruire de nombreuses villes bombardées, voire détruites. BNCI, Agence de Dunkerque, agence provisoire, 1950, Archives historiques BNP Paribas, 9Fi168-2 Face à l’ampleur des besoins, les ressources financières des banques sont mobilisées pour le redémarrage de l’économie. CNEP – Emprunt national 5% janvier 1949 pour la reconstruction et l’équipement, 1949, Archives historiques BNP Paribas, cotes 3AF041, 3AF042, 3AF043, 3AF044 Découvrez comment BNP Paribas a accompagné ce mouvement: Paribas et la Reconstruction : découvrez la série de 4 articles Aimer cette page 23 likes Partager cette page Linkedin Facebook Twitter Mail Copier le lien de l'article